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Union Internationale de la Marionnette

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Message International de Dario Fo – 21 mars 2005

Dernière modification: 27-01-2017

Le théâtre de marionnettes, de poupées et d’ombres est une des expressions les plus anciennes de notre culture. Chaque civilisation a dans ses racines théâtrales et littéraires des formes dramatiques liées au théâtre d’animation, qui a évolué, au cours des siècles, selon les modalités les plus diverses et les plus extraordinaires.

Il suffit de penser aux nombreuses variantes qui ont poussé comme des champignons au moyen âge, des premières représentations religieuses aux mystères, aux crèches réalisées avec bamboches, marionnettes à gaine et statuettes mobiles.
L’échange entre le théâtre officiel et celui d’animation a toujours été fécond et multiforme : les masques, par exemple, passent, dès le moyen âge, d’une forme théâtrale à une autre, s’enrichissant et intégrant les caractères des divers lieux scéniques.

Parmi les nombreux enchantements du théâtre d’animation, ce qui m’a toujours particulièrement fasciné est l’élément comique, hyperbolique, paradoxal, intelligent et efficace surtout dans la marionnette à gaine. Il s’agit d’un comique qui ne touche pas seulement la gestualité, langage pourtant fondateur de ce théâtre, mais aussi la parole, la situation dramatique et scénique, devenant satire souvent féroce et déglinguée, mais jamais une fin en soi.

La marionnette est en elle-même une synthèse de l’acteur, centrée aussi bien sur l’allusion du mouvement que sur son exaspération. Non seulement: dans le théâtre de marionnettes, tous les langages théâtraux convergent dans une forme intense et essentielle.
C’est aussi pour cela que personnellement je considère le théâtre d’animation comme une très grande source d’inspiration. Il m’arrive avec les marionnettes ce qui m’arrive avec la peinture: au moment où je me bloque et je ne peux pas poursuivre mon travail, je raisonne selon la séquence d’un spectacle de marionnettes, par synthèse, et, comme quand je réalise, en les peignant, des situations scéniques, l’intrigue dramatique se dénoue alors.

Les marionnettes ont été et sont toujours présentes dans mon travail. Naturellement, c’est là une chose que je dois beaucoup à Franca [Franca Rame, épouse et complice de longue date de Dario Fo] et à la tradition de sa famille, qu’elle a su conserver et aimer. Incidemment, Les Rame ont géré, pendant une certaine période de leur vie et avec beaucoup de succès, une compagnie de marionnettes, pour retourner ensuite, il y a environ soixante-dix ans, au théâtre d’acteurs.

Dès mes premiers spectacles, je me suis servi de divers pupazzi et burattini, à commencer par « Grande pantomima con pupazzi piccoli e medi » (Grande pantomime avec pupazzi petits et moyens), où plus de la moitié des personnages étaient interprétés par des marionnettes. La dernière expérience avec guignol a été la mise en scène avec Franca et Giorgio Albertazzi du spectacle « Il diavolo con le zinne » (Le diable aux nichons).

Pour conclure, je veux rappeler que dans le cas de la Grande pantomime on n’utilisait pas que des pupazzi, mais aussi des marionnettes à la manière catalane et d’autres, énormes, de plus de trois mètres de haut. Dans ce cas, on démontrait que la rupture avec l’unicité des moyens expressifs produisait une très grande valeur théâtrale, que nous-mêmes qui l’avions imaginée n’avions pas prévu.

Comme vous l’avez compris, j’aime les marionnettes, et la Journée Mondiale de la Marionnette organisée par l’UNIMA est pour moi l’occasion d’exprimer à voix haute la joie que chaque jour des artistes et des créateurs ressentent, un peu partout dans le monde, dès qu’ils agissent avec des marionnettes et des formes animées.

Dario Fo
Prix Nobel de Littérature 1997

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